Comment devenir un véritable expert des Champagnes ?

Elle est finie, l’époque où l’offre des vins de Champagne se résumait à « des grandes maisons prestigieuses » opposées à « des petits vignerons qui font du bon rapport qualité-prix ». Aujourd’hui, plus ersonne n’a le monopole de la haute qualité (ni du prestige, du coup) et la diversité est immense.

Pour l’amateur, la question est donc de comprendre les différences et, surtout, de savoir à quoi s’attendre dans sa flûte. Un premier article sur les vins spéciaux de Champagne a été publié récemment sur ce même blog : en voici la suite, pour lutter contre les idées reçues et découvrir des réalités méconnues et faire de vous un véritable expert du Champagne.

En finir avec le meunier

En Champagne, tous les cépages comptent. Le meunier autant que les autres. L’idée reçue que le meunier est un cépage faible n’a pas de fondement avéré. C’est un cépage de moindre longévité que le pinot noir ou le chardonnay mais il offre des arômes fruités et une matière très appréciable dans un assemblage, en particulier dans les champagnes destinés à être bus dans leur jeunesse. Typique de la vallée de la Marne, vous pourrez trouver des vins 100 % meunier de grande classe.

Savoir apprécier les bruts à leur juste valeur

Les bruts basiques se font rares. En cause, la diversification de l’offre, qui oblige les grandes maisons elles-mêmes à donner du caractère à leurs cuvées classiques. Le recours aux vins de réserve est l’une des évolutions les plus frappantes : de plus en plus de bruts cumulent plusieurs millésimes d’une même décennie et gagnent de la profondeur par cette occasion. Le champagne brut mérite toute notre attention.

Le sucre n’est pas un drame

« Oh c’est trop dosé ! » : vous avez déjà entendu ça dans une dégustation de soi-disant experts ? Moi aussi. Le dosage, ajout final de sucre après le dégorgement de la bouteille, n’est pas un crime, pas plus qu’un dosage bas n’est un gage de qualité. Le dosage est un art : il y a une harmonie à trouver avec le vin de base et cette harmonie dépend du vin de base. Un dosage à 4 grammes par litre peut se voir comme le nez au milieu de la figure si le vin est maigre, quand un autre à 7 grammes passera complètement inaperçu dans un vin bien en matière. D’autant que la détection du sucre n’est pas évidente : il est facile de le confondre avec le caractère vineux.

Les terroirs, une réalité

Comme pour toutes les autres régions viticoles, il faut se pencher sur la géographie de l’endroit. Le mieux est encore de s’y rendre car les paysages parlent d’eux-mêmes : les coteaux couverts de vignes, le soleil baignant les parcelles, la végétation du printemps, …  On a longtemps soutenu que la Champagne était une région sans terroir, que les maisons, voulant défendre leur marque, gommaient volontairement son effet. Mais comment peut-on gommer le terroir ? Impossible ! Le climat, la météo, les sols, les pentes rempliront toujours leur office, quoi qu’il advienne.

En Champagne, les terroirs se découpent à la parcelle près mais on peut quand même avoir une lecture efficace par village. Prenez le cas des chardonnays. Un chardonnay d’Avize donnera des vins tendus, élancés, quand leurs homologues de Chouilly offriront plus de matière. L’effet terroir joue à plein, puisqu’une question d’orientation et donc de maturité des raisins est en jeu.

L’élevage des vins, un parcours d’athlète complet

La maturation sur lie compte énormément dans la personnalité du vin : les Champenois nous l’ont parfaitement prouvé. Mais l’élevage préalable des vins, avant la prise de mousse, a aussi son influence. À travers la maturation des vins et la gestion des vins de réserve, l’élaborateur dispose d’une palette de couleurs supplémentaires, qui permet notamment de mettre en exergue le caractère d’un cépage ou d’un terroir. Les Champenois se montrent de plus en plus enclins à prendre leur temps, en particulier pour des cuvées spéciales. SI vous avez l’impression de goûter un Meursault avec des bulles, c’est probablement que le vin a été élevé sur lies !

La date de dégorgement

Certains élaborateurs mentionnent explicitement la date de dégorgement sur la contre-étiquette. Très bien. Elle nous indique souvent, par la même occasion, la durée de repos sur lies après la prise de mousse. C’est une information sur l’histoire du vin, le parcours qu’il a accompli avant d’arriver dans votre verre, mais aussi sur son avenir. Sur ce point, rappelons qu’un Champagne se porte bien pour longtemps, en particulier si sa maturation sur lies a été longue. La rétention du vin en bouteille lui donne du potentiel de vieillissement. Donc, nous aussi, prenons le temps.

La dégustation des Champagnes : on lâche la pression !

C’est banal mais toujours bon à rappeler : aimer, apprécier, connaître, c’est d’abord bien déguster. Un verre à champagne est l’outil indispensable à avoir pour laisser s’exprimer les arômes. À défaut, une flûte en forme de bulbe fera l’affaire. Mais surtout, c’est le moment de détente du vin dans le verre qui fera la différence : attendez quelques minutes avant de goûter le vin que vous venez de verser. Le gaz de pression sera un peu dispersé et la matière du vin n’en sera que plus évidente.

Bonne dégustation !